Fic traduite, elle ne m’appartient pas...La Série du Prisme
La lumière se divise en un arc-en-ciel, les couleurs de l'amour et de la perte fusionnent brièvement avant de se disperser à nouveau... Les pensées d'Angel et Cordélia, durant une année de naissance, de mort et de changement.
Titre: Noir
Auteur: Dazzle
Traductrice: Aurélie (a.a.k)
Estimation: PG-13
Spoilers: Dans les environs de l’épisode de la saison trois d’Ats "Impardonnable"
Sommaire: Après l’enlèvement de Connor, Angel est paralysé par le chagrin, la colère, le doute et la perte. Septième dans la Série du Prisme, qui suit le développement des sentiments de Cordy et Angel durant la saison trois.
Le symbolisme du noir: peur, anonymat, tristesse, remord, colère, mystère, deuil, mort.
***
"Qu’est-ce que vous faites, bon sang?"
Je peux entendre Gunn hurler sur moi. Je peux sentir le personnel me tirer de la pièce. Mais tout ça semble se passer très loin.
Quelque part, juste à l’extérieur de mon corps, il y a ce monde avec de la lumière et du bruit. Dans ce monde, Gunn crie pour que j’arrête. Fred pleure derrière moi. Et devant moi – s’éloignant de plus en plus, comme en allant au ralenti – il y a Wesley. Je le vois haleter dans son lit d’hôpital, et puis je vois la porte se refermer devant moi, et c’est un soulagement de ne plus le voir.
La rage qui me propulsait disparaît, remplacée par – le néant.
"Angel, arrête, arrête, tu ne le penses pas, tu sais que tu ne le penses pas --" C’est la voix de Fred. Ca doit être les mains de Fred sur mes épaules.
"Sortez-le d’ici ou on appelle la police." Ca doit être un garde de sécurité. Si je tournais la tête un petit peu, je le verrais. Je ne tourne pas la tête. Je fixe la porte fermée.
"Tu ne rentres pas là-dedans." Gunn m’attrape le bras et me tire plus loin. Je le suis, Fred trébuche près de nous, alors qu’on se dirige vers le garage. Je ne résiste pas.
Et puis il fait plus sombre, et ça sent le caoutchouc et l’huile, et je peux voir la camionnette de Gunn. "Je ne sais ce que c’était, bordel," marmonne Gunn, les mots résonnent contre les murs.
"Il est bouleversé," dit Fred. Sa voix est remplie de larmes. "Il souffre. Les gens font des choses qu’ils n’ont pas l’intention de faire quand ils souffrent."
"Il avait l’air d’en avoir l’intention pour moi!"
"Wesley va bien. Il va bien. Si Angel avait vraiment eu l’intention de t – de blesser Wesley, tu crois qu’il n’aurait pas pu le faire?"
Je m’éloigne d’eux de quelques pas. Au bout du garage, je peux voir de fines bandes de lumière, saignant du ciel au-dessus. La lumière est faible et pâle – le ciel est couvert, peut-être. Mais c’est assez. Alors que je me dirige vers elles, je les entends se disputer. Les mots rebondissent sur la surface de mon esprit; ils ont du sens, et cependant ils ne veulent rien dire.
"C’est une chose fichtrement malsaine, attaquer un homme couché dans son lit d’hôpital --"
"Charles – ce qui est arrivé à Alonna – si c’était la faute de quelqu’un, même si c’était quelqu’un que tu aimais – tu pourrais jurer que tu ne ferais pas la même chose?"
Le feu n’est pas la façon la plus rapide de partir. Ca fait mal, ça fait mal comme pas possible. Je me souviens de la dernière fois où le soleil m’a brûlé --
Et puis je m’en souviens profondément en moi, le souvenir me frappant avec la vue et les odeurs et la sensation comme si ça se passait maintenant. Je me tenais dans la cour, et une main était en feu, et dans l’autre bras je portais mon fils.
Je brûlerais pour toujours si ça veut dire que je pourrais sentir son poids dans mes bras une dernière fois. Mon fils. Connor.
Je fais un autre pas vers la lumière --
"Angel! Qu’est-ce que tu fais?!" Fred m’attrape à moitié, me saute dessus à moitié; son petit corps tout mince ne semble même pas avoir de poids. "Tu essayes de sortir? Tu sais que tu ne peux pas?"
"Hey, hey, hey." Gunn se met devant moi, et je n’ai d’autre choix que de le regarder dans les yeux. Ils sont sombres de douleur – rappelée ou nouvelle – alors qu’il me fait face. "Le suicide n’est pas une option, vieux. Je sais que c’est dur --"
"Tu ne sais rien."
"Tu parles que je ne sais pas. Je veux dire, je n’ai même jamais -- " Il n’arrive pas finir. "Je sais ce que ça fait d’avoir mal. J’ai perdu ma soeur, tu te rappelles?"
J’ai perdu ma soeur aussi. Et mon père, et ma mère, et mes amis, et Doyle -- et Buffy – et chacun d’entre eux m’a déchiré en lambeaux, quand j’ai su ce que j’avais fait. Chacun d’entre eux est une blessure de laquelle je n’ai jamais cru que je me remettrais. Et s’ils m’étaient tous rendus, en vie et en bonne santé et m’aimant comme si rien ne s’était jamais passé, je les renverrais tous en enfer si ça voulait dire que Connor pouvait être en sécurité.
"Angel, mec." Gunn essaye fort d’être gentil. C’est nouveau pour lui. Je n’arrive pas à dire si ça lui va bien ou pas. "Tu ne peux pas faire ça."
"Tu ne peux pas m’en empêcher." Je regarde derrière lui, la lumière pas-si-distante.
"Non, je t’en prie --" Fred avance péniblement entre moi et Gunn, passe ses bras autour de ma taille. "Angel – si tu vas là dehors – qu’est-ce qu’on va dire à Cordélia?"
Le nom me rentre dedans, et tout ce qui semblait distant il y a juste une minute – les odeurs, la sensation, la douleur physique – coupe à travers mon chagrin. En une précipitation vive, je suis complètement de retour dans le monde réel. Et c’est mille fois pire.
Je sens mon visage se contorsionner d’agonie, et avant que mes yeux ne se brouillent de larmes, je vois les expressions de Gunn et Fred changer de la panique mal dissimulée au choc et à la douleur. "Oh, mon Dieu," m’étranglais-je. "Qu’est-ce que je vais dire à Cordélia?"
Mes jambes cèdent sous moi, et je m’effondre sur mes genoux. Fred enroule ses bras autour de mes épaules; Gunn se tient près de nous, dressé au-dessus, un gardien silencieux. On est blottis ensemble dans le garage, trois réfugiés d’un monde meilleur dans lequel on ne pourra jamais retourner.
Connor est dans une dimension démoniaque. Mon fils est en enfer. Je me souviens de l’enfer.
"Oh, Angel, je suis désolée, je suis tellement désolée," répète Fred, encore et encore, comme si c’était sa faute d’une façon ou d’une autre. Gunn ne dit rien, mais je sens sa main toucher mon épaule avec hésitation. Je lutte pour ne pas sangloter, parce que si je commence, je ne m’arrêterais pas. Mais les larmes n’arrêtent pas de monter, de ruisseler le long de mon visage, et je ne me sens même pas assez fort pour les essuyer.
Une femme passe à côté de nous, essayant manifestement très fort de ne pas regarder. Je suppose que d’autres personnes ont déjà fait ça. Craquer et pleurer à l’extérieur de l’hôpital. Parfois elles l’ont fait parce que j’ai tué quelqu’un qu’elles aimaient. Elles ressentaient ce que je ressens maintenant. Cette dévastation – ce pire-que-le-néant – c’est ça que j’ai amené au monde pendant un siècle.
Est-ce que les Puissances ont pris mon enfant pour me montrer ça? Si oui, qu’elles rôtissent et périssent. Connor n’était pas une leçon. Il n’était pas un outil pour mon instruction. Il était – son propre chef --
"Allez, Angel." Fred est gentille alors qu’elle essuie mon visage pour moi. "Rentrons à la maison --"
"Je ne peux pas," murmurais-je à travers ma gorge serrée. "Connor – ses affaires sont là. Ses jouets." Un tapis amusant qui couine et clignote, et un chien en chiffon rouge. "Son berceau."
"Alors allons chez moi," dit Gunn. "Tu peux rester là autant de temps que tu voudras. Laisse nous t’installer, ok?"
C’est une petite chose, d’une façon – vient chez moi au lieu d’aller chez toi. Mais Gunn ne m’a jamais invité là-bas et, même s’il ne l’a jamais dit, je sais que c’est parce qu’il avait sagement peur d’Angélus, assez malin pour ne pas laisser un vampire être son ami. J’ai essayé de tuer son meilleur ami il y a dix minutes, mais il fait l’offre ici et maintenant. "Merci," parvins-je à dire, parce que je sais qu’il mérite au moins ça. "Mais je ne peux pas. Je ne peux pas être près de qui que ce soit pour le moment."
Qui que ce soit d’humain.
"On ne te laisse pas tout seul," insiste Fred.
"Je n’irais pas," dis-je. "Je n’irais pas dehors. Je ne – me ferais pas de mal." Je sens plus que voir Fred et Gunn échanger un regard. "Je ne blesserais personne d’autre." Personne d’humain.
"Tu jures, mec?" dit Gunn. "Ne nous oblige pas à dire à Cordélia qu’on t’a perdu aussi."
J’allais sortir dans la lumière et finir tout, et j’aurais fait du mal à Cordélia. Comme si le monde avait besoin de plus de souffrance. "Non," murmurais-je. "Je reviendrais. J’ai juste besoin d’être seul."
D’une façon ou d’une autre je me relève – comment mon corps peut-il encore avoir de la force? J’ai l’impression que mes membres pèsent mille kilos. Ma tête commence déjà à faire mal, une douleur sourde qui palpite des tempes à la mâchoire. Mais je trébuche vers l’égout du garage, soulève le couvercle. Le métal couine, et je peux voir l’entrée du système d’égout.
Fred dit, "Qu’est-ce que tu vas faire?"
"Un peu de bien," dis-je, et je me laisse tomber dans la boue.